• Clohars-Carnoët (29). Emmanuel Todd, l'historien à bon port -par Stéphane BUGAT (LT.fr-5/11/2017)

    Clohars-Carnoët (29). Emmanuel Todd, l'historien à bon port -par Stéphane BUGAT (LT.fr-5/11/2017)L'historien et anthropologue Emmanuel Todd, retraité de l'université, a posé ses valises près du port de Doëlan, à Clohars-Carnoët, où le polémiste a trouvé une « quiétude rassurante ». Il vient de publier « Où en sommes-nous ? », une somme des connaissances et des recherches qui ont occupé son existence.

    « Cette interview pour Le Télégramme, c'est un des sommets de ma carrière », lance-t-il en vous accueillant. Disant cela, Emmanuel Todd ne plaisante pas. Ou pas vraiment. Car il voue un attachement à la Bretagne, d'autant plus réel qu'il fut tardif. C'est parce qu'il s'était lassé de la Provence, où il avait ses habitudes, qu'il a cherché un autre havre de paix, pour travailler et réfléchir, pour s'éloigner de cette vie d'intellectuel et de chercheur qui peut s'avérer haletante, en tout cas la sienne.

    Il se savait de vagues racines bretonnes, par l'intermédiaire d'un grand-père. C'est ainsi qu'il s'est trouvé une plaisante bicoque à Doëlan, en Clohars-Carnoët, non loin du port, et qu'il a vite appris à y aimer les paysages et le climat mais surtout les gens. « Du massif des Maures au port de Doëlan, y a-t-il deux mondes plus opposés, en France ? » observe-t-il. « Ici, j'ai été surpris par la douceur de l'hiver mais j'ai surtout trouvé une quiétude rassurante, des gens discrets et bienveillants, et surtout honnêtes. Lorsque les commerçants se trompent en vous rendant la monnaie, c'est toujours... à leur désavantage ».

    Cette ode à la douceur peut surprendre venant de ce grand gaillard qui a souvent accompagné sa rigueur intellectuelle d'une certaine vigueur d'expression. Il s'en explique : « Un chercheur n'a pas le droit de se penser mauvais ». Sans pour autant nier sa propension à prendre le contre-pied des idées reçues du moment. « La violence du timide, » confesse-t-il. « On me perçoit comme un polémiste, alors que je suis plus souvent défensif qu'offensif. La vérité, c'est qu'après chaque intervention à la télévision, je sors épuisé par le stress ». À 66 ans, Emmanuel Todd publie « Où en sommes-nous ? » (voir encadré), sous-titré « Une esquisse de l'histoire humaine », le terme esquisse venant utilement pondérer l'ambition du propos. Un ouvrage qui restera probablement comme son oeuvre maîtresse, la somme des connaissances et des recherches qui ont occupé son existence, « comme la preuve d'une non vie réelle ». Ce n'est pas un hasard s'il a daté le manuscrit du jour de sa retraite universitaire.

    Digne héritier de Le Roy Ladurie

    Historien et anthropologue, il doit sans doute aux influences d'une famille peu banale d'avoir suivi un parcours qui le différenciait des siens. Son père, Olivier, est journaliste et écrivain, grande figure de la presse française, dont le père était d'origine austro-hongroise et la mère britannique. Ce n'est pas par hasard si le jeune Emmanuel a effectué une partie de ses études à Cambridge. Sa mère, publicitaire de profession, est la fille du philosophe et journaliste Paul Nizan, ce qui faisait de Claude Lévi-Strauss un cousin par alliance. C'est pourtant à la famille de sa grand-mère maternelle, Henriette Alphen, dans laquelle on trouve des banquiers juifs à la fois éclairés et humanistes, qu'Emmanuel Todd est tenté de se référer. Et à celui qui fut son véritable inspirateur, Emmanuel Le Roy Ladurie, figure fondatrice de l'anthropologie historique, dont il est devenu le digne héritier.

    L'histoire qui développe l'esprit critique

    Dès l'âge de 10 ans, sa voie était tracée. « Je voulais être historien ». Mais d'une histoire qui dépasse les personnages de légendes et les grandes dates imposées, pour se comprendre et se raconter d'abord à partir de grandes masses statistiques. Une histoire qui fait la part belle à l'influence des familles, des religions et des idéologies. « L'histoire comme un ensemble de supertankers qui se déplacent dans le temps », résume-t-il. Une histoire qui, si l'on en croit les prises de position d'Emmanuel Todd, développe grandement l'esprit critique. Tout particulièrement envers les hommes politiques qu'il juge « insuffisants ». « Ils commentent l'histoire plus qu'ils ne la maîtrisent », précise-t-il.

    « Plus vraiment en démocratie »

    Voilà qui nourrit son pessimisme ? « Si l'on considère que la démocratie c'est quand les élus appliquent les décisions du peuple, nous ne sommes plus vraiment en démocratie. À cet égard, la date clé, c'est le non au référendum sur le traité établissant une constitution pour l'Europe, en 2005. Les élites se sont assises sur ce vote. Depuis, comment ne pas voir que l'Europe va à la catastrophe ? ». Le néo-retraité Emmanuel Todd ne veut certes pas faire fi de ses convictions mais simplement changer de rythme. Sans négliger de répondre aux invitations, telles celles de la librairie Dialogues, à Brest. « Un des musts absolu », selon lui. On continuera donc à le lire et à l'entendre, mais il s'accordera le luxe du recul et des « balades tranquilles, pour redécouvrir le plaisir d'être citoyen du plus beau pays du monde ». Et on le verra, de plus en plus souvent, dans sa maison de Doëlan.

    Stéphane BUGAT

    source: http://www.letelegramme.fr

    Enregistrer

    « Appel aux communistes de France – 28 octobre 2017GRAND SUCCES du MEETING du P.R.C.F. commémorant la REVOLUTION D’OCTOBRE (5/11/2017) »
    Partager via Gmail Yahoo! Pin It

    Tags Tags :
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :