• D’après Philippe Klein, médecin français à Wuhan : "L’épidémie est terminée en Chine, la vie a repris son cours" (marianne.net-5/10/20)

    D’après Philippe Klein, médecin français à Wuhan : "L’épidémie est terminée en Chine, la vie a repris son cours"

    Par

     

    Depuis plusieurs semaines, le nombre de contaminés au Covid-19 s'élève à nouveau en France. Alors que le pays se prépare à une "deuxième vague", l’épidémie semble terminée en Chine. Entretien avec Philippe Klein, médecin français, directeur d’une clinique dans la ville de Wuhan.

    En France, l'atmosphère est morose. Les bars ferment dans les deux plus grandes villes du pays et les mesures de restrictions des loisirs s'enchaînent. 66 départements sont classés en "situation de vulnérabilité élevée". Près de 12.000 nouveaux cas sont dénombrés chaque jour depuis deux semaines. Les patients Covid remplissent à nouveau les hôpitaux, et de fait les services de réanimation (893 en une semaine). Tandis qu'à 9.000 kilomètres de là, à Wuhan, épicentre de l'épidémie, la vie reprend "paisiblement". L'heure est à la fête et aux vacances scolaires. Officiellement, le pays d’où tout à commencé ne compte plus aucun cas de contamination locale de Covid-19 depuis près d'un mois et demi. Après neuf mois de restrictions strictes, le président chinois Xi Jinping a même déclaré le 8 septembre dernier : "L'épreuve est derrière nous".

    Mirage, mensonge ou réalité ? En mars dernier, le médecin français Philippe Klein, par ailleurs directeur d'une clinique à Wuhan, avait alerté la France au sujet de l'intensité et de la virulence de l'épidémie. "Nous devons faire comme les Chinois ont fait", avait-il dit à Emmanuel Macron à l'orée de la première vague. Plusieurs mois plus tard, il tient toujours le même discours. Entretien.

    Marianne : La Chine a été le point de départ de l’épidémie et a longtemps été scrupuleusement observée à ce titre. Depuis quelques semaines on n’en entend plus vraiment parler. L’épidémie y est-elle réellement terminée ?

    Philippe Klein: L’épidémie est maîtrisée en Chine depuis le 8 avril 2020, jour du déconfinement. D’après les chiffres officiels, cela fait plus d’un mois et demi qu’aucune contamination locale n’a été enregistrée. Récemment il y a eu une dizaine de cas dans la province de Yunnan, située à la frontière birmane, mais il s’agissait de cas importés. Ce que je vois tous les jours à l’hôpital le confirme. Nous n’hospitalisons plus de personnes atteintes du Covid-19 et nos services de réanimation sont aussi désertés par la pathologie. L’épidémie est terminée en Chine. Le pays commence même à assouplir certaines normes sanitaires, comme le port du masque obligatoire dans les lieux publics. La vie a repris son cours, comme avant.

    En France, on assiste à une flambée des cas, les lits de réanimation se remplissent peu à peu et la déprogrammation des hospitalisations des patients atteints d'autres pathologies a débuté. La crainte d’une deuxième vague est là. Y a-t-il eu le même phénomène en Chine ?

    Non, pas du tout. En Chine, nous avons eu la vague que l’on connaît à Wuhan et dans la région du Hubei au début de l’année. Depuis, il n’y a pas eu de nouvelle recrudescence des cas comme cela s’observe en France. Cet été, certains quartiers de Pékin ont été spontanément reconfinés à cause de l’apparition de quelques dizaines de cas. Mais il s’agissait de foyers isolés qui ont rapidement été maîtrisés par une méthode très stricte de tests, de traçage et d’isolement. Comme à Wuhan, le masque n’est désormais plus obligatoire dans les rues de Pékin.

    Comment l’expliquer ? 

    En Occident et notamment en France, on a voulu freiner l’épidémie et pas la stopper. On n’a pas assez écouté et observé la Chine alors que le pays a vécu en premier le choc de cette épidémie. Si cela avait été le cas, l’Europe n’aurait pas été si surprise et impréparée face à cette première vague. Il y a eu une sorte de déni et de parti pris perpétuel vis-à-vis de la Chine.

    Reprenons les choses dans un ordre chronologique. Wuhan, épicentre de l’épidémie, connaît le choc sanitaire début janvier. C’est-à-dire que les capacités médicales des hôpitaux de la ville ont été débordées et que l’on ne pouvait plus s’occuper des autres pathologies, exactement comme cela a été le cas en France en mars. A ce moment-là, le seul moyen d’arrêter la catastrophe, c’est le confinement général. C’est ce qu’il se fera à partir du 23 janvier. Le 17 février, des mesures encore plus drastiques seront prises pour stopper toutes les sorties, quelles qu'elles soient. A partir de là, les autorités chinoises commencent à identifier et recenser les cas positifs et les cas contacts. Des hôtels sont utilisés pour écarter et isoler les personnes positives de leur famille ou en tout cas de leur lieu de vie.

    Par ailleurs, en Chine tous les patients ont été traités. Le gouvernement a fait construire des structures en un temps record. L'Occident s'est beaucoup moqué à ce titre. Encore une fois, la Chine a montré dès le départ sa volonté de stopper l'épidémie alors que nous, nous avons décidé de seulement la freiner, certainement faute de moyens. C’est la grande différence.

    Quelques jours après le grand confinement du 17 février, il n’y a donc plus aucun brassage de population et les cas positifs ont été extraits de la population saine. De fait, le nombre de contaminés a chuté. Celui des hospitalisations aussi. Le déconfinement se met en place le 8 avril avec toutes les mesures de distanciation sociale que l’on connaît (port du masque dans l’espace public, lavage régulier des mains etc.) La population retourne travailler. Or, pour sortir d’une épidémie, il ne faut pas seulement le dire ou le proclamer, il est nécessaire de le prouver. Un point majeur pour ne pas perdre la confiance du peuple. C’est ce que s’attèlent à faire les autorités chinoises au cours des deux premières semaines du mois de mai. En quinze jours, les 11 millions de Wuhanais ont été testés. Seuls 600 positifs furent dénombrés. Ils ont ainsi été isolés, et leurs contacts tracés. L’utilisation de l’intelligence artificielle a elle aussi joué un grand rôle.

    En France, l’application Stop Covid n’a pas été téléchargée en masse. Seulement 3,2 millions de personnes l'utilisent. Quel a été le fonctionnement de l’application en Chine ?

    C’est très simple, au déconfinement, si vous vouliez vivre normalement il fallait avoir l’application. C’est-à-dire que tout le monde devait l’utiliser partout, notamment à l’entrée d’un supermarché ou encore dans les transports en commun à l’aide d’un QR code à scanner. Il y avait deux couleurs. Le vert pour signifier que l’on n’est pas malade, et le rouge pour annoncer que l’on est cas contact et donc potentiellement contaminé. Lorsque vous passez du vert au rouge, vous êtes obligés de vous confiner pendant quatorze jours. Toutes les personnes que vous avez croisé sont alertées et invitées à se faire tester et à se confiner à leur tour.

    A LIRE AUSSI >> Covid-19 : cinq mois après le confinement, la grande inconnue du nombre de morts en Ehpad

    Est-ce arrivé fréquemment que des personnes passent du vert au rouge et doivent se reconfiner ?

    Non. En fin en tout cas ce n'est pas de ce que j’ai pu observer autour de moi, ou à la clinique.

    D'après les derniers chiffres connus, la Chine fait état de 91.000 cas et 4.560 décès (contre 619.190 cas confirmés en France et 32.230 décès). Ces données sont-elles fiables d'après vous ?

    Je ne maîtrise pas les chiffres officiels. Ayant été acteur et témoin de toute cette épidémie, je peux vous dire que la méthode développée par la Chine a été efficace. D'autant plus que autour de moi en Chine, je n'ai pas de retour de mortalité importante. En France j'ai néanmoins eu le ressenti inverse, notamment parce que des amis, ou des parents d'amis ont été touchés. C’est une analyse très subjective, mais encore une fois je ne suis pas garant des  chiffres des autorités chinoises.

    Aujourd’hui comment est la vie ?

    La vie sociale a largement repris. Depuis vendredi nous sommes en période de vacances scolaires car nous sommes en plein dans les fêtes nationales chinoises. Les gens sont appelés à voyager et à consommer. Les activités culturelles ont repris, les boîtes de nuit ont rouvert et les voyages à travers le pays sont autorisés. Les Chinois peuvent aussi se rendre en dehors du territoire mais ils doivent par la suite réaliser une quatorzaine. Et comme je le disais, le masque n’est plus obligatoire dans tous les lieux et nous n'utilisons plus d'application "stop covid". On sent une vitalité qui a le goût de l’avant. Pour autant, il existe une réelle culpabilité d’avoir été l’épicentre de ce virus.

    Que diriez vous à Emmanuel Macron si vous l’aviez à nouveau au téléphone aujourd’hui ?

    Je crois que, même si nous vivons dans un monde pour ainsi dire "différent", les préoccupations des Chinois vis-à-vis de ce virus sont les mêmes que celles des Français. Alors, si j'avais le Président de la République une nouvelle fois au téléphone, je lui rappellerais ce qui a été fait ici et comment l’épidémie a été maîtrisée et pas seulement freinée. Pour cela, les lits de réanimation sont le nerf de la guerre.

     

    source: https://www.marianne.net/

    « Que le nom de notre Parti dise ce que nous sommes aujourd’hui et ce que nous serons demain (Blog de D Bleitrach-6/10/20)Quimperlé-Les salariés de Bigard remontés contre les pointeuses [Vidéo] (LT.fr-7/10/20-19h20) »
    Partager via Gmail Yahoo! Pin It

    Tags Tags : ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :