Interdit depuis 1997 en France et depuis 2005 à l’échelon européen, l’amiante continue d’occuper les débats portuaires. « Parce que l’amiante est encore très présent sur les bateaux » explique-t-on à la cellule CGT de Damen, à Brest. « Pas question de sortir du dispositif de compensation à l’exposition de l’amiante ! », argumentent les ouvriers régulièrement confrontés à la fibre cancérigène.
Les procédures d’identification des zones et des éléments concernés ainsi que les niveaux de protection ont considérablement évolué. « Rien à voir avec nos prédécesseurs qui travaillaient l’amiante sans aucune protection ». « On est nombreux à avoir des membres de nos familles qui travaillaient sur les bateaux et qui sont morts de l’amiante », résume Romuald L’hostis.
De l’histoire ancienne ?
Aujourd’hui, malgré les procédures et les protections, le risque d’exposition accidentelle perdure. En règle générale, si les navires construits en France et en Europe se sont largement passés de l’amiante, les unités construites ailleurs dans le monde et particulièrement en Asie en contiennent encore à des endroits précis. Dans les gaines de chaleur (calorifugeage), les joints de moteur, de chaudière, dans certaines peintures, dans les colles de carrelage, de moquette… « Les petits jeunes qui débarquent dans le métier sont persuadés que l’amiante, c’est de l’histoire ancienne. On leur explique l’inverse. D’ailleurs, la plupart ignore complètement ce qu’est l’amiante ». C’est donc auprès des anciens qu’ils apprennent à se méfier, à signaler certains joints ou pièces suspectes et à s’équiper en conséquence pour éviter de s’exposer.
90 % de navires étrangers
« La Chine autorise jusqu’à 15 % d’amiante dans la composition de certains produits, afin d’améliorer leurs caractéristiques et de continuer à produire à bas coût. L’amiante ne coûte pas grand-chose », observe Ludovic Lamour, de la CGT Damen. « À Brest, nous traitons 90 % de navires étrangers. Vous pouvez être sûrs de trouver de l’amiante dans les unités de plus de vingt ans, qu’elles soient européennes ou a fortiori asiatiques ! ».
Sans être construit en Asie, un navire qui fait l’objet d’une intervention dans un pays exotique peut très bien revenir avec des éléments amiantés, particulièrement dans la zone machines et pour des joints soumis à hautes températures.
« Pas d’amiante sur les navires militaires »
Et les navires militaires français ? « Bizarrement, les bateaux gris ont échappé au Repérage amiante avant travaux », s’étonne le syndicat CGT. « L’État nous demande d’appliquer un dispositif qu’elle ne prévoit pas pour ses propres navires ! ». Puisque, officiellement, il n’y a plus d’amiante à bord des plus récents d’entre eux.
Et les plus vieilles unités ? Elles arrivent heureusement progressivement à la casse. Mais pas toutes, à l’image du dock flottant de Rouen venu se faire une beauté à Brest, l’été dernier. Un dock construit en Turquie et acheté à Abu-Dhabi, loin, très loin des normes en vigueur dans notre pays.
Source : https://www.letelegramme.fr
Auteur : Stéphane Jézéquel