Le canal de Nantes à Brest, du côté de Redon (Ille-et-Vilaine), permet la navigation fluviale. L’objectif de la Région Bretagne est de la développer dans sa partie finistérienne.  

Une association environnementale et en faveur de certaines espèces dénonce les investissements de la Région, pour la navigation sur le canal de Nantes à Brest. Elle demande le débarrage.

« C’est un projet économiquement fumeux, onéreux et qui n’est viable qu’à renfort de subventions. » Josselin de Lespinay, administrateur de l’Association nationale pour la protection des eaux et rivières (Anper), ne mâche pas ses mots pour qualifier le projet de la région Bretagne pour le canal de Nantes à Brest. Gestionnaire de la partie finistérienne depuis le 1^er janvier 2020, celle-ci a investi 1,8 million d’euros pour moderniser les ouvrages existants et permettre la navigation entre Port-Launay et Carhaix (et au-delà). 

Ouverture permanente

L’association nationale, spécialisée dans les contentieux et pro-truites, ombres et saumons, demande, elle, un débarrage du canal. Mais pas ceux fait par l’Établissement public d’aménagement et de gestion du bassin-versant de l’Aulne (Epaga), deux fois par an. pour favoriser les passages de poissons migrateurs. Les échelles à poissons n’ayant, selon l’Anper, « qu’une efficacité limitée ». 

Ici, il s’agirait d’une ouverture permanente et définitive des écluses, pour libérer la circulation de l’eau et favoriser la remontée de poissons. La demande est portée au nom de la biodiversité et de certaines espèces menacées d’extinction, comme le saumon et l’alose.

Quelles espèces privilégier ?

Le hic ? D’autres associations qui mettent également la question des écosystèmes au cœur de leur action, prônent l’inverse. « Il ne faut pas les transformer pour en créer d’autres », explique Rémy Jan, de ​Canal 29 Ster Vras. Pour lui, le débat sur les débarrages, ponctuels ou définitifs, est obsolète. « Aujourd’hui, le canal a un écosystème consolidé par deux siècles d’existence. Le retour à une nature qu’on imagine pure est une vision de l’esprit et liée à notre considération de la nature comme propriété de l’homme qui la façonne. De nouvelles modifications auraient un impact sur tout le vivant. »

« Effectivement, ce sont des choix à faire, reconnaît Josselin de Lespinay. Mais certaines espèces sont en voie de disparation. D’autres non. » Son association pointe également les sommes investies par la Région Bretagne. « Ouvrir les écluses est beaucoup moins onéreux, à terme, argumente-t-il, sans chiffrer l’alternative. L’Agence de l’eau financerait, s’il fallait enlever des ouvrages. » 

« Oui, c’est contradictoire »

« Ce serait l’idéal, répond l’Agence de l’eau, qui mène une politique en faveur de la restauration des cours d’eau. Mais encore faut-il qu’un maître d’ouvrage nous sollicite. » 

Elle pourrait aussi, « au cas par cas », soutenir la réalisation de passes et ascenseurs à poissons qui lui seraient présentés mais là encore « nous n’avons pas de demande d’aide à ce jour pour des travaux sur l’Aulne canalisée ». Contradictoire, non ? « Oui, reconnaît-on dans les services. Mais araser tous les ouvrages est une solution extrême. Si on peut trouver une petite continuité écologique, c’est déjà ça. »

L’association Eau et Rivières de Bretagne, elle, n’a pas de position définie sur le sujet. Elle attend avant tout de la Région « de vraies études d’impact du projet de navigation fluviale sur l’environnement. » En attendant, les débarrages ponctuels censés favoriser la remontée des migrateurs vers leurs lieux de reproduction auront désormais uniquement lieu en automne. Pour ne pas pénaliser la navigation aux beaux jours.

Carole TYMEN

source: https://www.ouest-france.fr/