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Opinion | Covid-19 : acceptons de prendre le risque raisonnable d'être contaminé-Par Professeur Alex CARPENTIER (lesechos.fr-23/09/20-14h05)
Si le confinement des premières semaines a été salutaire pour organiser la prise en charge hospitalière de nos malades, il faut désormais mettre fin à cette médecine sanitaire préventive de groupe qui paralyse la France entière. Empêcher un virus de circuler est une illusion, écrit le professeur Alexandre Carpentier. Plus de 60 % de la population sera atteinte, quel que soit le niveau de coercition.
par le Professeur Alexandre CARPENTIER (chef de service de neurochirurgie à l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière)-publié le 23/09/2020 (14h05)
A la mi-mars, le monde s'arrêtait de tourner, grippé par le Covid-19. Six mois plus tard, les bavettes chirurgicales à la pâleur spectrale masquent les visages sur tous les continents. La peur de la contagion immobilise… Mais est-ce bien raisonnable de la laisser asphyxier notre pays ? Est-ce bien sensé de la laisser nous étrangler ?
Si le confinement des premières semaines a été salutaire pour organiser la prise en charge hospitalière de nos malades, je m'insurge qu'en cette rentrée scolaire, parce que trois enfants sont révélés positifs au Covid-19, des écoles entières ferment à peine ouvertes, renvoyant pléthores de parents et d'enfants dans leurs charentaises. Je m'insurge que ce virus serve d'alibi béni à tous nos désengagements : ceux-là sont bien plus assassins.
Un enfant qui décroche, un autoentrepreneur qui se suicide, un chef d'entreprise qui licencie ne méritent-ils pas qu'on se libère de nos excès de précaution ?
Peut-on revenir à la raison et mettre fin à cette médecine sanitaire préventive de groupe qui paralyse la France ? On égrène nos morts dans des litanies Covid à faire pâlir notre quatrième âge, mais pourrait-on mettre en balance toutes les victimes collatérales ô combien nombreuses : suicides, dépression, pauvreté et exclusion, surendettés, licenciés, déscolarisés, patients non-Covid et faillis ? Un enfant qui décroche, un autoentrepreneur qui se suicide, un chef d'entreprise qui licencie faute de commandes, ne méritent-ils pas qu'on se libère de nos excès de précaution ?
Circuler, c'est la vie d'un virus
Empêcher un virus de circuler est une illusion. Plus de 60 % de la population sera atteinte, quel que soit le niveau de coercition des règles sanitaires. Ce sera ainsi et ce sera « la faute à personne ». C'est la vie d'un virus.
Chaque année, des gens meurent de la grippe, bien que vaccinés. La maîtrise d'un virus n'est donc que partielle. Elle le sera tout autant avec le prochain antidote Covid. Et rappelons aussi que 80 % des personnes emportées par les grippes saisonnières ou le Covid-19 ont plus de 75 ans : à quel âge la mort a-t-elle le droit de voler son butin sans qu'on l'impute à un autre ?
Reprenons donc le cours de nos vies, acceptons de prendre le risque raisonnable d'être contaminé comme nous l'avons toujours fait. A-t-on jamais arrêté le pays pour pic épidémique de grippe ? Le « protéger quoi qu'il en coûte » aura un effet boomerang trop considérable pour que nous poursuivions ainsi plus longtemps.
Testons, isolons, mais ne fermons pas
Alors ne parlons plus de confinement à grande échelle. Gardons nos masques et nos gels : ils nous protègent individuellement et collectivement en lissant les contaminations. Ceci évite la saturation des services de santé et, de facto, permet une meilleure prise en charge. Voilà notre responsabilité : un engagement de chacun et une responsabilité partagée.
Que celui qui est testé positif s'isole pour préserver les autres. Si un élève se révèle positif, ne fermons pas l'établissement ! Si un salarié est Covid+, ne fermons pas l'entreprise ! Que celui qui est médicalement fragile se confine pour se préserver : son médecin traitant saura le guider.
Que tout prélèvement soit étiqueté du numéro de téléphone du patient. S'il revient positif, les agences régionales de santé pourront immédiatement avertir le porteur, lui rappeler son devoir d'isolement, lui attribuer l'arrêt maladie ad hoc et le surveiller (médicalement parlant, c'est entendu) si besoin.
Sacrifice d'une génération
Libérons de toute responsabilité morale les directeurs d'école, les chefs d'entreprise et nos gouvernants pour que la vie ne s'arrête plus, pour que les conséquences sociétales déjà majeures ne s'alourdissent pas. Le ralentissement économique d'un pays peut très vite engendrer une double faillite, sociale et sociétale, impactant non pas seulement une population à un temps T, mais plusieurs générations. Aujourd'hui nous sacrifions l'avenir, nous sacrifions nos jeunes.
Alors, acceptons le risque d'être vivants et vivons pleinement notre vie de mortels. Là seulement réside notre vraie responsabilité.
Alexandre Carpentier, Chef de service de neurochirurgie à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière.« La deuxième vague n’est pas virale mais économique et sociale : l'appel de 250 intellectuels (marianne.net-8/10/20-14h45)Zidane, Le Fur, Diagana...90 sportifs, dirigeants et médecins demandent la réouverture des salles de sport (jdd.fr-11/10/20-13h14) »
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