1-Advancy veut fermer, Secafi prédit la rentabilité
Pour décider si la Fonderie de Bretagne doit rester dans le groupe Renault, un cabinet, Advancy, a été mandaté par la marque au losange pour analyser la situation de l’usine caudanaise et émettre des conclusions. Les représentants du personnel ont fait la même démarche auprès d’un autre cabinet, Secafi.
Renault a annoncé ce jeudi 11 mars chercher un repreneur pour l’usine après les conclusions du rapport Advancy, « qui estime les pertes pour le groupe à 116 M€ cumulées d’ici à 2030, dans le meilleur des cas, avec un volume à 33 000 t et un programme d’économie de 7,20 M€ ». « Un rapport à charge » pour la CGT, syndicat majoritaire de l’usine.
Le rapport de Secafi dit, lui, tout autre chose : « La Fonderie pourrait être rentable en dix ans », relate Maël Le Goff, secrétaire CGT de la Fonderie de Bretagne. « Il va falloir que Renault dise vraiment la vérité. Le rapport officiel, c’est Secafi, celui mandaté par le comité social et économique. Ce rapport se base sur l’historique de l’entreprise, sur les volumes de Renault ».
Le chiffre d’affaires de l’usine n’a cessé de baisser, « il est passé de 61 M€ en 2015 à 47 M€ pour 2021 », présente la CGT.
2-Des documents « expurgés et incomplets »
Pour le rapport Secafi, le coût d’une pièce serait de 1, 73 €/ kg alors qu’Advancy table sur 1, 14 €/ kg. Pourquoi une telle différence ? « Parce que Advancy n’inclut pas l’usinage, la peinture, le transport dans le coût des pièces. Dans quels pays sont produites les pièces ? Dans quelles conditions de travail ? Ça, on n’arrive jamais à le savoir », rapporte Maël Le Goff.
La bataille se joue sur les chiffres et ils ne plaisent pas trop à la CGT. « Dans ses calculs, Advancy considère que le boîtier différentiel et la porte fusée sont au même prix sauf qu’un porte-fusée, c’est douze personnes de moins à toucher la pièce, ça ne peut pas coûter la même chose ». Secafi déplore que les documents transmis par Renault soient « expurgés ou incomplets ».
Le rapport recommande « d’augmenter le volume des pièces Renault. Le groupe a besoin de 32 000 t de boîtiers et de porte-fusées mais ne nous en donne que la moitié. Il faudrait aussi augmenter notre production pour BMW. Il y a de quoi remplir l’usine », plaide Maël Le Goff.
Dans le rapport mandaté par la direction de Renault, il est préconisé d’éteindre un four de l’usine, une hérésie pour les salariés : « Si on éteint un four, la production est impactée. On doit attendre sans arrêt le métal ». Le rapport Secafi estime au contraire qu’il faudrait 90 embauches pour atteindre la rentabilité.
3-Les pouvoirs publics ont investi 8,50 M€ depuis 2009
8, 5 M€ ont été mis sur la table par Lorient Agglomération, la Région Bretagne et l’État depuis la reprise de l’usine par Renault en 2009. Les pouvoirs publics ont demandé un entretien avec le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, « car ce qui est en train de se passer est à l’opposé des déclarations du ministre sur la relocalisation », plaide Maël Le Goff. La Fonderie de Bretagne n’aurait récupéré que 90 % des pièces parties à l’étranger après l’incendie de 2019 « mais pas tous les volumes. Nous sommes toujours en 2/8 car nous n’avons pas le tonnage espéré. Il prévoit 12 000 t pour 2023, cela veut bien dire que Renault nous enfonce en nous retirant des volumes », pointe Maël Le Goff.
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Renault a annoncé officiellement, jeudi 11 mars, vouloir se séparer de la Fonderie de Bretagne, à Caudan. Une décision que fustige la CGT, après neuf mois de revue stratégique. Le syndicat majoritaire de la Fonderie de Bretagne annonce une grève de 24 heures à partir de lundi 22 mars, à 22 h.
Un nouveau comité social et économique (CSE) extraordinaire doit se tenir lundi, à 14 h. Le syndicat appelle tous ceux qui souhaitent se mobiliser pour le maintien de la Fonderie de Bretagne dans le giron de Renault à les rejoindre mardi 23 mars, à 10 h, sur le parking de l’usine.
Rendez-vous avec les élus locaux vendredi
Frédéric Sanchez, secrétaire fédération métallurgie CGT sera présent, de même que le PCF qui appelle les citoyens à participer « au rassemblement de lutte et de résistance ». Le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, fera aussi le déplacement « pour venir soutenir les salariés dans leur bataille ».
La CGT invite « tous les pouvoirs publics siégeant à Lorient Agglomération, à la Région Bretagne, qu’ils soient dans l’opposition ou pas, à venir s’exprimer sur l’avenir de la Fonderie de Bretagne ». Les représentants du personnel rencontreront notamment Fabrice Loher, président de Lorient Agglomération, ce vendredi 19 mars, avant le CSE extraordinaire de lundi, pour lequel la CGT attend des réponses à 17 questions, dont une centrale : « Que va-t-on devenir s’il n’y a pas de repreneur ? ».
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Céline Le Strat
source: https://www.letelegramme.fr/