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TÉMOIGNAGES. « À Brest, être un jeune de Pontanézen, c’est avoir une étiquette sur le front ». ( OF.fr - 19/02/22- 08h31 )
Pour Nabil, 18 ans, et Haddou, 16 ans, le quartier de Pontanézen où ils ont grandi est comme un « cocon familial ».
Ils font partie des 56 jeunes ayant rédigé une tribune pour dénoncer la stigmatisation après les événements survenus à Pontanézen, en janvier 2022, à Brest (Finistère). Nabil, 18 ans, et Haddou, 16 ans, racontent les conséquences qu’ont eues ces violences urbaines et l’exposition médiatique qui en a suivi sur leur quotidien.
« Quand de bonnes choses sont faites, on n’en entend pas parler. Mais dès qu’il y a des voitures cramées, des arrestations, ça fait direct polémique et on finit à la télé. » Nabil, 18 ans, et Haddou, 16 ans, sont nés et ont toujours vécu à Pontanézen, à Brest (Finistère). Fin janvier 2022, leur quartier s’est retrouvé sous les projecteurs médiatiques après une série d’incidents qui a conduit à bloquer le réseau de transports en commun.
Les articles et reportages se multiplient sur ces violences urbaines, jusque dans les médias nationaux. Même Marine Le Pen y fera un passage express depuis sa voiture, évoquant « une enclave de non-France ».
Les deux jeunes assistent, impuissants, à cet emballement. « On a lu des trucs de fous sur les réseaux, des incitations à la haine. Les gens parlaient comme s’ils connaissaient Pontanézen, alors qu’ils n’y avaient sans doute jamais mis les pieds », se rappelle Haddou. « Tout le monde est mis dans le même sac alors que nous sommes des milliers d’habitants. Ça fait mal au cœur », abonde Nabil.
« Les préjudices sont énormes »
Les conséquences sont très concrètes pour les deux jeunes, investis au sein du centre social Horizons. Quelques semaines plus tôt, ils avaient déposé un projet au budget participatif de la Ville pour revaloriser le city stade et y installer un parcours sportif en plein air. « Sauf que dans un article, quelqu’un a dit que c’était le point de recrutement des futurs dealers. Alors que c’est complètement faux. Avec des rumeurs pareilles, ça fait tout tomber à l’eau… »
Cet épisode vient alimenter leur méfiance envers les médias, malgré leur envie de s’exprimer pour apporter un autre regard. Craignant que leurs propos soient déformés, ils décident de rédiger un « droit de réponse ». Un noyau dur se rassemble pour l’écrire et 56 jeunes du quartier s’y associent.
« Ces diffamations à tout bout de champ nuisent à notre estime, à notre image, à notre vie. Les conséquences et les préjudices pour notre génération sont énormes. Nous ne voulons pas que les actes d’une minorité compromettent nos engagements quotidiens », peut-on notamment lire dans cette tribune qui est envoyée aux médias puis relayée par ces derniers.
Rapports tendus avec la police
Pour Nabil, qui vient de finir ses études, cela se traduit déjà dans son insertion professionnelle. « C’est comme si on nous collait une étiquette, déplore-t-il. Quand on recherche un stage, on nous dit qu’ils n’ont besoin de personne. Et quelques semaines plus tard, on voit des stagiaires sur les lieux… »
Encore en classe de seconde, Haddou évoque plutôt les contrôles de police et, plus globalement, les rapports tendus avec les autorités. En particulier les jours et semaines qui ont suivi les tensions de janvier.
« Ce sont des CRS qui étaient là, et pas les patrouilles habituelles qui nous connaissent, savent qui met le bordel ou non. Des fois, on marchait dans le quartier et ils passaient à côté de nous en nous filmant. Ou alors ils mettaient les lampes éblouissantes de leurs camions vers nous, alors qu’on était juste assis dehors », raconte Haddou, qui explique que « ça s’est calmé depuis ».
« S’en prendre au tram, c’était bête »
Dans ce quartier, dont ils parlent avec tendresse et qu’ils voient comme un « cocon familial », les deux jeunes connaissent toute leur génération, de près ou de loin. Y compris ceux s’étant retrouvés en janvier 2022 face aux forces de l’ordre, avant de bloquer le tramway et incendier un véhicule Bibus.
Des agissements qu’ils condamnent fermement : « On n’a pas compris pourquoi ils avaient fait ça. S’en prendre au tram, ça n’avait aucun rapport, c’était bête. Ça a bloqué tout le monde, les mamans, les grands-mères… », regrette Nabil.
Cela ne les empêche pas de comprendre la tentation de l’argent facile que peut représenter le trafic de stupéfiants pour certains jeunes avec qui ils ont grandi. « Ils vont voir des personnes s’acheter une voiture, de beaux habits, alors que leur père travaille et galère pour nourrir toute la famille. Forcément, ils peuvent se dire “Moi aussi, je veux ça” », illustre Haddou.
Des maraudes dans tout Brest
Dans le parcours des deux jeunes, le centre social, qu’ils fréquentent « depuis la garderie », a joué un rôle important. « À un moment, on faisait pas mal de bêtises et ils nous ont dit qu’on partirait en voyage si on se tenait tranquilles. On a compris qu’on avait à y gagner », raconte Nabil.
L’an dernier, ils ont passé le niveau supérieur en créant une association junior, Ponta’Régal. En plus de collecte de vêtements et de dons, ils ont organisé des maraudes dans plusieurs quartiers de Brest pour distribuer de la nourriture aux personnes dans le besoin. Pour eux, l’initiative aura été à la fois une bonne action, un plus dans le CV et un pied de nez aux stéréotypes.
« On va continuer, et on espère que d’autres prendront le relais. En faisant ça, on veut aussi montrer un bon exemple aux petits, qu’ils voient qu’un autre chemin est possible. »
Source : https://www.ouest-france.fr
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Tags : jeune, haddou, qu’il, nabil, brest
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