Voilà 22 ans que Sophie Le Potier travaille comme infirmière en réanimation à Lorient. Et ce n’est pas de trop pour évoluer dans un service si exigeant et polyvalent. « On traite du médical et du chirurgical. On fait de la cardiologie, de la néphrologie, de la pneumologie, tout ce qui est défaillances vitales », présente l’infirmière de 49 ans.
Et pourtant, elle n’a pas de diplôme spécifique, juste celui d’infirmière diplômée d’État. « Mais en sortant de l’Ifsi (*), les soignants ne sont pas capables de travailler en réanimation », assure-t-elle. C’est pour la reconnaissance de leur statut spécialisé que les personnels paramédicaux seront en grève ce mardi 11 mai. À Lorient, ils iront à la rencontre du public, devant l’hôpital du Scorff, de 14 h à 16 h.
Doubler le nombre de lits, pas anodin
À l’arrivée de la covid-19 en France, Sophie Le Potier s’est sentie « hypermotivée » pour réagir à la pandémie. Pour faire face à l’afflux de patients et permettre des transferts entre les régions, l’Agence régionale de santé (ARS) a décidé de doubler le nombre de lits en réanimation. À Lorient, le service est passé de dix à 20 lits et ce n’est pas anodin. Il faut une infirmière pour deux patients et demi, il a donc fallu renforcer le personnel, d’anciens collègues sont venus prêter main-forte, des soignants d’autres services ont dû être formés sur le tas.
«Un patient qui arrive en réa, ce n’est jamais programmé et les premières heures sont cruciales»
« La covid a mis en lumière ce que l’on savait déjà : les aides-soignants et infirmiers ne peuvent pas être remplacés au pied levé ! Après trois semaines de formation, on demande à une infirmière d’aller mettre une dialyse chez un patient, elle ne sait pas faire et c’est normal. Ce n’est pas parce que l’on est formé trois semaines que l’on est apte à prendre en charge, dans sa globalité, un patient de réanimation », assure Sophie Le Potier.
L’expérience lorientaise
La réanimation de Lorient compte une soixantaine de paramédicaux, dont 32 infirmiers. Le service a fait face aux trois vagues de l’épidémie grâce au soutien de tout l’hôpital, de la direction en passant par la pharmacie, le bloc, mais surtout grâce à son expérience. « La réa à Lorient, c’est en moyenne 13 ans d’expérience, c’est exceptionnel, on ne voit pas ça dans les hôpitaux parisiens où il y a beaucoup de turnover. Cela nous a bien aidés. Ma crainte, c’était de voir la qualité des soins baisser, mais cela n’a pas été le cas et on en est très fier de cela », relate l’infirmière.
L’expérience, c’est la clé pour s’en sortir en réanimation. « Un patient qui arrive en réa, ce n’est jamais programmé et les premières heures sont cruciales, cela prend du temps et il faut aussi gérer les familles pour qui c’est un choc. On ne doit pas les abandonner », expose Sophie Le Potier. Elle a mis un an à se sentir à l’aise dans ce service et voit bien les jeunes soignants arriver stressés. « Pour une aide-soignante, faire du nursing sur un patient branché, intubé, ventilé avec des fils partout, ce n’est pas évident ».
(*) Institut de formation en soins infirmiers.
Céline LE STRAT
source: https://www.letelegramme.fr/