• Brest. À 85 ans, le père Jean Miossec poursuit ses combats (OF.fr-6/09/20-7h10)

    Jean Miossec réside à Pontanézen, à Brest. À la retraite, il continue d’aider à la fois la communauté de son quartier et les migrants arrivés dans la cité du Ponant.Jean Miossec réside à Pontanézen, à Brest. À la retraite, il continue d’aider à la fois la communauté de son quartier et les migrants arrivés dans la cité du Ponant. 

    Encadrement des jeunes ouvriers, réconciliation franco-algérienne, aide aux migrants : cet ancien appelé de la guerre d’Algérie et prêtre à la retraite y a dédié toute sa vie. À 85 ans, Jean Miossec est, aujourd’hui encore, plus que motivé par des combats humanistes et nobles.

    « La guerre n’en finit pas dans les têtes et les cœurs si elle n’est pas nommée, montrée, assumée dans et par une mémoire collective. » Cette phrase de Benjamin Stora résume en quelques mots le combat que mène, chaque jour, Jean Miossec.

    Prêtre à la retraite, il vit aujourd’hui dans le quartier populaire de Pontanézen, qu’il considère comme « un village très sympathique, où l’on peut dialoguer avec tout le monde, et avec des gens d’Algérie notamment ». Tout au long de sa vie, il n’a eu de cesse d’œuvrer pour les autres, et notamment pour la réconciliation entre les Français et les Algériens.

    En 2013, Jean Miossec retourne en Algérie, où il n’est pas allé depuis 1958. À cette époque-là, il effectue son service militaire, en pleine guerre coloniale, alors considérée comme « les événements d’Algérie ». « C’était formidable de revenir, se remémore-t-il, nous avons eu un bel accueil, avec quatre familles d’anciens combattants du Front de libération nationale (FLN), autour d’un très bon couscous »

    Revenir en Algérie

    Avec douze anciens appelés français et leurs épouses, ils s’y rendent une autre fois, en 2017. Ce groupe de retraités fait partie de l’Association des anciens appelés en Algérie et leurs ami(e)s contre la guerre (4ACG). Chacun d’entre ses membres verse sa retraite d’ancien combattant, à des associations algériennes dédiées aux personnes en situation de handicap ou aux jeunes au chômage.

    Ce voyage leur permet aussi de récolter des témoignages, parfois douloureux, des militaires de l’époque, Français comme Algériens, ainsi que des Pieds noirs. La 4ACG a publié un livre regroupant leurs paroles : Guerre d’Algérie, guerre d’indépendance.

    Pendant la guerre, Jean Miossec s’occupe du ravitaillement du foyer central de régiment. « J’achetais des camions de bière aux commerçants algériens. C’était pour garder le moral des troupes ! », précise-t-il, le sourire aux lèvres. « Nous étions 800 hommes à peu près, logés dans des fermes. »

    Le déni de la guerre

    Chez certains anciens appelés, les souvenirs de l’Algérie sont passés sous silence, durant de longues années… « À mon retour en France, j’avais complètement oublié la guerre. » 

    « Après avoir terminé mon séminaire, je suis devenu prêtre en 1961 », dans la paroisse « bourgeoise » de Saint-Louis, à Brest. « En 1967, j’ai découvert la jeunesse ouvrière chrétienne, la JOC. J’encadrais des groupes de parole », explique-t-il. Aumônier fédéral de la JOC de Brest, il s’occupe de cette jeunesse, souvent précaire, et leur fait « découvrir leurs droits, les accompagne dans leurs démarches ».

    Il travaille aussi avec les femmes de maison et leurs patronnes chrétiennes. Ensemble, ils rédigent une convention collective pour les congés payés. Ces textes servent aux syndicats, qui mèneront la lutte pour ancrer les règles concernant les salaires et les congés de ces femmes de maison, qui travaillaient parfois jusqu’à tard le soir et le week-end.

    Une vie de combats humanistes

    50 ans plus tard, Jean Miossec se consacre désormais aux migrants. « En 2012, je suis tombé sur une quinzaine de familles d’Albanie. Ils étaient à la rue, raconte-t-il. J’ai rencontré les gens pour comprendre leur situation. Je leur ai apporté du pain ». Puis en 2014, il devient bénévole pour l’association Digemer , qui cherche des logements pour ces personnes en difficulté.

    En 2016, il se consacre plus particulièrement aux réfugiés qui n’obtiennent pas l’asile, « encore plus défavorisés », à travers l’association Cent pour un toit. « Leur pays n’est pas en guerre, mais les restes des guerres précédentes sont bien là. Des mafias sont en place. Si l’État français ne considère pas leur pays comme un pays en guerre, ils n’obtiennent pas toujours l’asile. »

    « C’est important de continuer à vivre, considère-t-il à 85 ans. Et aider les autres, c’est ce qui motive le plus ».

    Laura ROUDAUT

    source: https://www.ouest-france.fr/

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