• Livre. Et s’il fallait évacuer la Bretagne à cause du nucléaire ? (OF.fr-21:02/21-9h00)

    Geoffrey Le Guilcher sort son premier roman, « La Pierre Jaune », une fiction réaliste, post-catastrophe nucléaire dont l’action se situe à Saint-Gildas-de-Rhuys et sur la presqu’île.Geoffrey Le Guilcher sort son premier roman, « La Pierre Jaune », une fiction réaliste, post-catastrophe nucléaire dont l’action se situe à Saint-Gildas-de-Rhuys et sur la presqu’île. 

    Geoffrey Le Guilcher sort un roman post-catastrophe nucléaire dont l’action se déroule sur la presqu’île de Rhuys (Morbihan). Une fiction réaliste sur les effets d’une explosion à La Hague : « Ce serait au moins sept fois Tchernobyl ».

    Après une biographie sur Luc Besson et une enquête sur les abattoirs ( Steak machine ) La Pierre Jaune est votre troisième livre mais votre premier roman, pourquoi ce format littéraire ?

    J’ai la conviction que la fiction permet de rendre plus puissantes certaines histoires. J’avais envie de raconter une histoire avec des personnages contemporains forts ; d’une fiction qui stimule l’imaginaire.

    En racontant la survie post-nucléaire en Bretagne d’un petit groupe, à la suite d’un attentat à l’usine nucléaire de La Hague (Manche), est-on autant que cela dans la fiction ?

    Pas vraiment. J’avais fait une première enquête de 6-7 pages sur La Hague, il y a dix ans, quand j’étais journaliste aux Inrocks. Après cela, j’étais fasciné que l’hypothèse basse en cas de catastrophe sur ce site, ce soit sept fois Tchernobyl. C’est dingue ! Cette usine récupère le combustible usé des centrales pour séparer le plutonium, l’uranium… Elle a dans ses piscines environ 10 000 tonnes de combustibles irradiés, le double des 56 réacteurs des 18 centrales nucléaires de l’Hexagone. J’ai ensuite beaucoup lu sur Tchernobyl, Hiroshima, Fukushima… Dans La Pierre Jaune, je donne un nombre de morts, de déplacés, mais bien sûr certains éléments dépendraient de la quantité libérée dans l’atmosphère au moment de l’explosion, de la météo, des vents, etc. Les brûlures, les pluies acides, les plantes qui changent de couleur, des coquillages qui deviennent fluorescents la nuit, les meutes de chiens comme à Tchernobyl : j’ai gardé des choses qui m’avaient marqué, pour que mes recherches servent mon imaginaire.

    Au-delà de la catastrophe, vous parlez aussi surtout de ceux qui restent…

    Je me suis documenté sur les gens de ces territoires qui décident malgré tout de rester sur place. J’ai lu La supplication de Svetlana Alexjevitch [Nobel de littérature] sur l’après-Tchernobyl ou les récits forts du journaliste John Hersey [prix Pulitzer] qui a rencontré sept survivants d’Hiroshima pour son reportage paru dans le New Yorker. J’ai aussi lu le roman Malevil de Robert Merle. Quand on s’intéresse à ces personnes qui restent ou qui choisissent d’aller en zone contaminée, on se rend compte qu’on est comme plongé dans un film catastrophe : on ne peut plus boire, plus manger les radis du jardin. Tout leur monde est transformé. C’est un des risques du nucléaire : il n’a pas droit à l’accident. Que l’accident vienne d’une erreur, d’une guerre, d’un séisme… les conséquences sont les mêmes.

    Vous situez toute l’action à Saint-Gildas-de-Rhuys et sur la presqu’île de Rhuys… ça n’est pas tout à fait un hasard ?

    Non. Déjà, je pense que si la moitié de la France devait être évacuée comme dans le livre, il y aurait des Bretons qui ne voudraient pas partir ! Surtout je viens ici depuis mes 3 ans, et j’en ai 35 ! On y allait en vacances avec mes grands-parents et mes parents (mon père est de Pleubian) qui ont une résidence à Kercambre. La petite plage de la Pierre Jaune, la pinède où on allait se réfugier quand il pleuvait, ce sont des lieux qui ont imprimé mon enfance et mon adolescence. J’adore cet endroit car la côte y est restée sauvage, il y a peu de maisons, des landes… Je vis à Paris et je viens maintenant régulièrement à Saint-Gildas, j’y ai des amis et j’y ai écrit une partie du roman. C’est un lieu presque mythique pour moi : il est rattaché à la France mais c’est une presqu’île… avec des dolmens de 3500 ans avant Jésus-Christ, et peuplée à 75 % de gens ne vivant pas là à l’année ou de retraités. C’est un beau lieu pour la retraite, et ce n’est pas une critique pour moi de dire cela. Saint-Gildas-de-Rhuys est l’un des personnages principaux de ce roman.

    Le roman se situe en 2024, pour mieux l’ancrer dans le réel. D’ailleurs ici la catastrophe est nucléaire, mais avec des similitudes avec la crise actuelle (ruée sur certains produits, confinement)… ?

    C’est vrai. Je n’étais ni pro ni anti-nucléaire quand j’ai commencé ce livre il y a 3 ans, juste un peu fasciné de réaliser le danger que cette industrie peut faire peser. Lors du confinement « dur » du printemps 2020, le roman était entre les mains de relecteurs qui m’ont dit que ça prenait une autre dimension avec la crise sanitaire. Un renversement de situation paraît moins impossible depuis le Covid. On est confronté à un vécu hors-normes. Comme après une catastrophe nucléaire, on apprend à vivre avec. Dans la Pierre jaune, Emmanuel Macron est toujours président en 2024 et j’ai même gardé son « Nous sommes en guerre » parce que le parallèle est dingue !

    On pourrait s’attendre à la constitution d’un groupe de survivants comme dans Walking dead, or on suit une communauté existant déjà avant l’attentat, pourquoi ?

    J’avais envie de personnages qui puissent exister maintenant. Choisir des néo-zadistes, avec une « zone à défendre », c’était assez cohérent. Ce sont des personnages déjà en alerte sur certaines dérives, très informés. C’était crédible qu’ils restent dans ce monde apocalyptique.

    Le narrateur est un policier infiltré dans ce groupe, un clin d’œil à votre expérience d’infiltré en abattoir pour le précédent livre ?

    L’infiltré permet d’avoir un œil naïf et qui découvre les autres, l’endroit. Il est en fait surtout inspiré de Mark Kennedy, un policier anglais infiltré dans les milieux gauchistes radicaux anarchistes pendant 7 ans. Moi je n’avais passé qu’un mois et demi dans un abattoir ! Cétait déjà une expérience bizarroïde et j’étais mal à l’aise avec cette position où les relations sont un peu faussées dès le départ.

    Êtes-vous toujours journaliste ?

    J’ai travaillé 3 ans aux Inrocks et même si l’écriture me prend actuellement davantage de temps, je suis toujours journaliste indépendant pour Le Canard Enchaîné, Médiapart, Le Monde, Les Jours, la Revue 21, plutôt spécialisé sur les investigations politico-financières, les histoires sociétales fortes. J’ai été coauteur de la BD enquête Sarko Kadhafi et je travaille en ce moment comme scénariste sur une BD de Camille Royer sur les corneilles, le deuxième animal le plus intelligent après l’homme.

    Question subsidiaire qui nous turlupine : dans le roman on apprend qu’Ouest-France a dû délocaliser son siège de Chantepie à Paris. Mais après, quand même Paris doit être évacuée, on va où ?

    Ah ah, peut-être Strasbourg, ou Marseille ! J’ai intégré Ouest-France dans l’histoire parce que le journal aurait un rôle à jouer dans une telle crise. J’y ai d’ailleurs fait deux mois de remplacement d’été il y a dix ans, à Vannes. Vu le maillage de ce quotidien, une partie des histoires qui remonterait du terrain viendrait d’Ouest-France !

     

    En quelques dates

    20 mai 1986, naissance à Créteil. 

    1989: premier été à Saint-Gildas-de-Rhuys.

    2011: enquête sur La Hague.

    2017: sortie du livre Steak machine

    Février 2020 : sortie de La Pierre Jaune (éditions de la Goutte d’or).

     

    entretien réalisé par Sylvie RIBOT.

    source: https://www.ouest-france.fr/

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