• Venezuela : Mercenaires-par Guillermo Cieza (Bolivar Infos-11/05/20)

    Dans la matinée du 3 mai s'est produite une agression extérieure contre le peuple et le Gouvernement du Venezuela organisée par la Colombie et les Etats-Unis et exécutée par des mercenaires recrutés par l'entreprise militaire étasunienne Silvercorp. Cette agression a eu 2 points d'incursion qui ont été détectés : Macuto dans l'état de Vargas et Chuao dans l'état d'Aragua.

    Le but des terroristes était de prendre l'aéroport de Marquetía et d'attenter à la vie du Président Nicola Maduro. Le contingent était composé d'un petit nombre de membres mais avait un armement sophistiqué et ils pensaient avoir du soutien sur place. Le Gouvernement Bolivarien a souligné que l'incursion a échoué parce qu'il avait des rapports du renseignement et qu'il n'a pas été surpris. Mais ce qui s'est passé à Chuao où les forces de police étaient en très petit nombre (à peine 6) et où les envahisseurs ont pu être arrêtés à cause de la forte présence des milices populaires est très parlant. L'image des mercenaires désarmés, plaqués au sol et attachés avec des filets de pêche a une haute valeur symbolique.

    L'utilisation des forces mercenaires dans les agressions exécutées par les Etats-Unis et la présence de ces entreprises militaires qui sont l'expression de la privatisation de la guerre ne sont pas une nouveauté. C'était déjà le cas avec ce qu'on appelait les « Contras » recrutés pour affronter le Gouvernement du Nicaragua à la fin des années 80 et financés avec de l'argent provenant du trafic de cocaïne et du trafic d'armes avec l’Iran dans une opération qui impliquait les mafias colombiennes, la DEA et les hautes autorités du Conseil de Sécurité National ainsi que John Bolton, récemment renvoyé et le sous-secrétaire d'Etat pour les affaires Inter-américaines toujours en poste Elliot Abrahms.

    Mais ce qui, dans ces années-là, attirait l'attention fait aujourd'hui partie du paysage du pouvoir militaire étasunien qui est devenu une machinerie de guerre qui combine les structures rigides de l'appareil militaire traditionnel et les structures flexibles qui regroupent les entreprises militaires, des groupes d'action psychologique et médiatique et des noyaux opérationnels officiels. C'est à dire que les dépenses militaires qui représentent 9% de PBI des Etats-Unis et 60% des dépenses militaires du monde, ne s'appliquent plus à des conflits ponctuels et ne vont plus dans un seul panier mais sont distribuées en fonction d’une guerre globale qui se caractérise par sa décentralisation et dans la quelle l'utilisation des forces militaires « non d'Etat » augmente. Cela inclut les mercenaires armés recrutés par les entreprises militaires et les mercenaires non armés qui font leur travail dans le système médiatique grâce à leur présence dans les médias officiels comme les chaînes qui ont le monopole des multimédias alignés sur l'Empire, ou comme l'armée d'opérateurs sur les réseaux sociaux. Ce sont eux qui sont chargés de diaboliser des peuples et des pays sélectionnés comme victimes des futures agressions militaires, d'affaiblir la confiance dans certains dirigeants, dans des luttes et des causes politiques et de créer des ordres du jour mondiaux et locaux favorables à l'Empire.

    Les transformations du pouvoir militaire des Etats-Unis ne sont pas inoffensives pour leur propre système parce que même s'il est certain que les entreprises ont besoin de l'autorisation du Gouvernement pour agir, en séparant l'exercice de la guerre de leur propre population, ils perdent le contrôle social de leurs actes. Les mécanismes de relations avec l'Etat qui combinent la culture du secret et l'irruption d'intérêts privés encouragent le fait que les actes de guerre tombent dans les mains de mercenaires et de vulgaires délinquants. La privatisation de la guerre épargne au Pouvoir militaire étasunien des dénonciations publiques comme celles qu'ont faites beaucoup de vétérans du Vietnam mais encouragent le fait que leurs actions soient impliquées dans des réseaux mafieux qui finalement conspirent contre leur propre succès. Il est assez parlant qu'avec l'aval de Trump, les sous-traitants militaires de Silvercorp aient signé des accords avec des individus comme Juan Jose Rendon y Juan Guaido. Les bagarres entre ces individus et le patron de Silvercorp, Jordan Goudreau, à cause du non respect du contrat, aujourd'hui rendues publiques, sont ce qu'elles semblent être : des bagarres de mafieux.

    Dur le terrain des médias, nous assistons aussi à ce processus de dégradation et de lumpénisation. Il suffit de comparer ce qu'offraient dans les années 60, en Argentine, des journalistes de formation de droite comme Mariano Grondona et ce que proposent actuellement des opérateurs médiatiques comme Luis Majul.

    Au-delà de ces avertissements, il me semble nécessaire de ne pas sous-estimer le nouveau scénario créé par les actions du pouvoir impérial dans la perception de la réalité. Les déclarations faites par de Karl Rove, un conseiller de Bush, en 2002 sont très parlantes : « Les gens croient que les solutions viennent de leur capacité à étudier avec bon sens la réalité discernable. En réalité, le monde ne fonctionne plus ainsi. Maintenant, nous sommes un empire et quand nous agissons, nous créons notre propre réalité. Et pendant que tu étudies cette réalité, nous agissons de nouveau et nous créons une autre réalité qui tu peux aussi étudier. Nous sommes les acteurs de l'histoire et vous, vous tous, il ne vous reste qu'à étudier ce que nous faisons. » C'est à dire que l'empire, c'est nous, nous définissons qui sont les bons et les méchants, nous définissons la réalité que vous allez discuter.

    Quand, en Argentine, le Président Alberto Fernández a inclut dans son analyse sur la non mise en place de la Loi sur les Médias des critiques de sa formulation, un geste qui a été renforcé par une réunion avec la haute direction du groupe Clarin, il a donné l'impression d'être très naïf ou d'être porteur d’une astuce dont les objectifs nous échappaient.

    S'il cherchait à gagner du temps, il est évident que les délais se sont épuisés. Ecouter les épidémiologistes pour gérer la quarantaine et prétendre faire payer un impôt sur les grosses fortunes a été suffisant pour que les grands médias déclenchent une attaque avec l'artillerie lourde.

    « Les brillants jeux tactiques » ne suppriment pas les questions gênantes. Peut-on gouverner avec l'intention de défendre les intérêts du peuple avec cette concentration des médias ?

    Peut-on développer des propositions de souveraineté sans affronter l'Empire ?

    Peut-on affronter l'Empire avec des dirigeants comme ceux de la CGT qui, de leur propre initiative, proposent de décider une baisse du salaire des travailleurs ?

    Au Venezuela, ce n'est pas le renseignement militaire et l'astuce des gouvernants qui a réussi à arrêter les mercenaires. Il a fallu la volonté de résistance du peuple incarnée par les pauvres pêcheurs et les travailleurs du cacao de Chuao, les miliciens du peuple, pour atteindre cet objectif.

    Quand l'Empire attaque avec ses armées de mercenaires, l'expérience bolivarienne nous donne des pistes pour avancer.

    Guillermo Cieza  

    Source en espagnol :

    https://www.resumenlatinoamericano.org/2020/05/10/venezuela-mercenarios/

    Source en français 'traduction Françoise Lopez):

    http://bolivarinfos.over-blog.com/2020/05/venezuela-mercenaires.html

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