• Bolivie : La chute d'Añez retarderait encore plus les élections et le retour à la démocratie (resumenlatinoamericano.org-10/08/20)

    Par Emilio Estévez

    L'ex-président Evo Morales se trouve à un grand carrefour puisque d'un côté, il voit que le soulèvement populaire auquel participent des membres du MAS mais aussi un grand nombre de gens qui se sont convoqués eux-mêmes, a radicalisé ses slogans. En effet, on n'entend plus aussi bien dans les blocages de paysans, de mineurs et de jeunes motards l'exigence des « élections le 6/9 » mais celle de « la démission immédiate d'Añez ». Sans doute, l'ennui des bases combatives boliviennes avec le mauvais Gouvernement dictatorial et son action criminelle contre le COVID-19 et la dure crise économique que supportent les secteurs les plus humbles ont provoqué une augmentation et un durcissement de la lutte.

    Un autre facteur déterminant est la forte apparition sur la scène de Felipe Quispe «El Mallku», un combattant légendaire des Gouvernements capitalistes et des oppresseurs de l'époque qui a précédé l'entrée du dirigeant du MAS au Palais Quemado.

    «El Mallku» a parcouru patiemment les principaux points de blocage des diverses provinces pour transmettre l'idée que la lutte pour que tombe le Gouvernement ne peut être ajournée. Sur un ton didactique et soutenu par de multiples partisans, Quispe détruit un à un les arguments de la dictature et dénonce Añez et son cabinet comme des « corrompus et des incapables. » « C'est fini, nous ne pouvons pas plus attendre, il faut les traquer, elle et ce guignol de Murillo jusqu'à ce qu'ils tombent, » dit-il sous les applaudissements et les cris de « Qu'ils démissionnent, qu'ils démissionnent ! »

    Face à lui, Evo parle depuis son lieu d'exil et utilise un autre ton. Sur Twitter, il signale : « Les dirigeants et les bases sociales mobilisées doivent opter de façon responsable entre la démission d' Añez qui retardera encore plus notre retour à la démocratie et des élections rapides avec la garantie des Nations Unies. » Il dit cela au moment même où le Gouvernement de fait présente une nouvelle plainte contre lui pour « génocide » et « terrorisme » en soutenant qu'il est responsable des mobilisations et des blocages.

    Pour une raison peu compréhensible à cause de tout ce qui s'est passé, l'ex-président fait une nouvelle fois confiance à la protection que pourraient lui donner des institutions très liées à l'Empire comme les Nations Unies qu'en la réponse que les masses seraient prêtes à obtenir dans la rue. Il faut rappeler qu'à l'occasion des élections qui lui ont été arrachées, il s'est trompé bien que beaucoup de gens l'aient prévenu, en invitant les Judas de l'OEA et même en écoutant les chants de sirène de son secrétaire général Almagro. 

    Dans les premiers jours du coup d'Etat militaire et civil fasciste, Evo avait aussi ordonné d'arrêter les blocages au moment le plus aigu, quand la pénurie avait déjà atteint les grandes villes, sous prétexte qu'il fallait éviter un massacre. Mais après que les paysans et les cultivateurs de coca se soient mobilisés, il s'est produit des attaques criminelles qui ont fait de nombreux morts à El Alto, à Sacaba et à Sencata.

    La dictature est faible mais il ne faut pas oublier qu'elle est soutenue par Washington et d'autres enclaves de l'Empire. Ses hiérarques n'abandonneront pas l'idée de continuer avec Añez ou sans elle. Ils ont en leur faveur, sur le plan local, et ils s'en sont déjà servi, des militaires, des policiers et les bandes paramilitaires de Santa Cruz et de la jeunesse kochala. Tous, à cette heure, ont commencé à militariser le conflit et promettent de tirer sur les blocages. Les graves incidents à Samaipata où plusieurs habitants ont été blessés sont un exemple qui peut se reproduire.

    Alors, cette évidente « déconnexion » entre celui qui continue à être reconnu comme le dirigeant et le chemin de lutte que prennent effectivement les bases boliviennes mobilisées n'est pas bon pour renforcer l'idée de renverser ceux qui font tant de mal au peuple. De toute manière, la véritable bataille se livrera sur le sol bolivien où beaucoup ne pensent plus que la dictature soit décidée à quitter le Gouvernement par la voie des élections. Alors, il devient inévitable de haïr les voix qui arrivent des blocages où la radicalité agit à sa guise. Là et pas dans une autre situation, sont nés les nouveaux chefs du peuple qui, dans un avenir proche, pourraient tracer la voie qui non seulement vaincrait les dictatures mais aussi les raccourcis ambigus et confus du réformisme.

     

    Source en espagnol :   https://www.resumenlatinoamericano.org/2020/08/10/bolivia-evo-morales-apunta-que-la-caida-de-anez-postergaria-aun-mas-los-comicios-y-el-retorno-a-la-democracia/

    source en français (traduction F Lopez) :   http://bolivarinfos.over-blog.com/2020/08/bolivie-la-chute-d-anez-retarderait-encore-plus-les-elections-et-le-retour-a-la-democratie.html

    « Bolivie : Evo appelle à prendre en considération l'arrangement obtenu pour les élections (telesurtv.net-10/08/20) Bolivie : Le Procureur poursuit Evo Morales et le dirigeant de la COB (telesurtv.net-10/08/20) »
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